histoire des établissements - hôtel-Dieu

L'hôtel-Dieu de l'Erdre

C'est au début du XVIe siècle que fut bâti de 1503 à 1508 celui que l'on considère comme le premier hôtel-Dieu, sur un emplacement qui aujourd'hui se trouve au cœur de la ville en bordure du cours des Cinquante Otages, mais qui était alors le confluent malsain de l'Erdre et de la Loire, toutes deux comblées de nos jours en cet endroit.
Sa superficie modeste occupait un carré de 53 m de côté, mais élevé sur deux niveaux. Si les soins y manquaient sans doute cruellement d'efficacité, bien que médecins et barbiers-chirurgiens en aient reçu la charge dès l'origine, c'est une nourriture en quantité suffisante qui faisait en général le plus défaut pour une population qui variait selon les époques,  de 130 à 300 personnes. L'hôpital ne vivait le plus souvent  que de la charité publique et de ce que lui apportait l'aumônerie de la ville, aussi arrivait-il, comme en 1526 "que les pauvres comme les serviteurs mourrait quasi de faim". Un siècle plus tard, pour augmenter les ressources et alors que dans sa cour avait été creusées sous les fenêtres prés de la chapelle des tombes qui dégageaient une odeur fétide, on y construisit des logements de rapport. 
A l'entrée de la rue du vieil hôpital, un pan de mur, amorce de la voûte d'un passage qui donnait directement accès à l'Erdre, peut être considéré comme le seul vestige de la construction primitive. Sa faible hauteur au dessus du sol actuel de la rue confirme, comme le rapporte l'histoire, que ce premier hôtel-Dieu était exposé aux débordements de la rivière.

Les hôtels-Dieu successifs de l'île Gloriette


La situation devenant intenable au bord de l'Erdre il faut trouver un emplacement pour la reconstruction d'un nouvel hôtel-Dieu. C'est un pré sur une île de la Loire qui est choisi en 1642 pour la qualité vivifiante de son air, bénéficiant des vents du large. Trois établissements s'y succéderont jusqu'à nos jours.

Prairie de la Madeleine. Le premier est érigé sur la prairie de la Madeleine. Le duc de Meilleraie achète le terrain en 1644 et l'offre à la municipalité; sa femme, Maryse Cossé, donne 6 000 livres ; la Chambre des comptes en donne 3 000 et un particulier 8 000. La mairie vote une subvention de 10 à 12 000 livres. On doit donc faire appel au roi qui se contente d'affecter à la construction de l'hôpital l'impôt établi pour les travaux de la cathédrale. L'établissement, mis en service en 1655, en même temps que l'on ferme l'hôtel-Dieu de l'Erdre, en impose avec son bâtiment central flanqué de deux ailes. Malheureusement, là encore, l'argent venant à manquer, on se contente par la suite, au lieu d'entretenir les bâtiments d'origine, d'élever un peu partout des verrues en matériaux de mauvaise qualité, au point qu'un demi-siècle plus tard, il est devenu un véritable cloaque. Là aussi, sous les fenêtres des salles où grouille la vermine, des tombes voisinent avec des dépôts de fumier. "Espèce de catacombe décorée du nom d'hôpital", dira plus tard Guillaume Laënnec qui réussit à en imposer la rénovation en 1793, portant le nombre de lits à 600 dans des salles blanchies à la chaux.

Petite-Hollande. Cependant, au XIXe siècle, la solidité des bâtiments laisse de plus en plus à désirer, la place et l'hygiène y manque. Après quatorze années de tergiversations et d'études, la première pierre d'un second établissement est posée, au sud du précédent, en 1856. L'ouverture a lieu 1863. D'une capacité de 900 lits, l'hôpital est construit sur un modèle largement usité à l'époque (hôpital Saint-André à Bordeaux, hôpital Lariboisière à Paris...) comportant deux groupes de cinq pavillons parallèles, de trois niveaux, reliés par de longs couloirs vitrés.

La façade, coupée en deux par la chapelle, abrite l'école de médecine et l'administration. S'adaptant au XXe siècle à l'évolution des techniques médicales l'établissement est progressivement doté de nouveaux services (ophtalmologie, ORL, neurologie, radiologie...). Malheureusement la deuxième guerre mondiale met fin à son histoire. Le 16 septembre 1943 un bombardement aérien qui ravage une partie de la ville de Nantes détruit la quasi-totalité des bâtiments de l'hôtel-Dieu et y fait quelque 60 morts (20 malades et 40 membres du personnel: médecins, religieuses et agents divers). Seul témoin de ce passé, un tilleul, près de l'entrée du centre régional de transfusion sanguine, dresse encore sa silhouette rabougrie dans le ciel nantais. Dans un petit jardin à gauche de la façade s'élevaient avant les bombardements une croix de fonte et le médaillon de la "Vierge de crée-lait" qui perpétuaient le souvenir de Gilles de Rais pendu et brûlé à cet endroit le 25 octobre 1440 pour sorcellerie, sodomie et meurtres d'enfants. Tous deux ont malheureusement disparu depuis.

Dès la libération s'impose la nécessité de la reconstruction de l'hôtel-Dieu, cependant que, pour faire immédiatement face aux besoins de la population, les différents services s'installent tant bien que mal dans les locaux de l'hospice général Saint-Jacques. L'hôtel-Dieu sera-t-il reconstruit sur le même emplacement, pour des raisons de commodités immédiates, ou à l'extérieur de la ville pour favoriser un développement futur, comme le suggéraient les visionnaires? La première solution l'emporte. Tout ce qui reste de l'ancien hôtel-Dieu est donc rasé et, après bien des difficultés, dont l'une des principales fut la nécessité d'ancrer profondément une telle masse de béton sur un sol sablonneux, le nouvel hôpital, dû à l'architecte Roux-Spitz, ouvre ses portes en 1967. A ses côtés s'était élevé quelques années plus tôt le bâtiment de verre des facultés de médecine et de pharmacie, complétant ainsi ce qui était devenu le CHU.
source: AHHPSN