La métamorphose impensable (essai sur le transsexualisme et l'identité personnelle)

Pierre-Henri Castel

Publié le 19 avril 2011 Mis à jour le 11 juillet 2011

Etre un homme ou une femme est-il naturel ou culturel? L'identité sexuelle s'enracine t-elle dans le corps, est-ce un donné psysiologique, voire neurobiologique? Ou ne s'agit -il que d'un rôle qu'on joue qu'on pourrait intervertir avec d'autres et dont on pourrait altérer le texte?

La métamorphose transsexuelle est une voie d'accès privilégiée à ces interrogations, parce que le réel de l'identité, avant d'avoir pu dire son mot, est ici forcé par un fabuleux acte autoconstructif: si tant sexuels, si leur affaire est à la pointe avancée de la bioéthique, de la critique de la culture ou de la protestation libertaire, c'est justement parce qu'ils assument leur identité comme une "construction sociale". Dans la sphère éthérée des débats savants, ils font sentir l'urgence d'une affaire de vie ou de mort, en un court-circuit inattendu entre une question de catégorisation et une atteinte directe de la chair.

Le problème est, pour le dire d'un mot, métaphysique. Il vise le noeud obscur qui attache ce corps à ce je; il oblige donc à dévoiler quelle nature humaine il faut, à un moment ou à un autre, nous supposer. Et il est à peine besoin de l'approfondir pour que la philosophie, la psychanalyse, mais aussi la médecine, la sociologie, le droit - toute disciplines aspirant à sauver leur rationalité, voir leur scientificité, face à ce qui paraît la déraison même, "changer de sexe" - en ressortant ébranlés.

Telle est la crise des certitudes qui motive cet essai.

Editions Gallimard