L’éventration

L’éventration est une hernie qui apparait sur une cicatrice d’une chirurgie antérieure (incision). C’est une faiblesse qui crée un trou (appelé aussi collet) dans l’enveloppe des muscles de la paroi abdominale, qui est appelée aponévrose. Elle apparait après une opération, le plus souvent par voie ouverte, mais dans certains cas par voie coelioscopique. Des viscères intra abdominaux passent à travers ce trou, surtout lors de la position debout et en fin de journée, créant ainsi la « bosse » ou « boule ». Au fil du temps, le trou va augmenter de taille sous la pression exercée par ces viscères.

Eventration sur cicatrice de laparotomie médiane

A quoi est due cette pathologie ?

Elle est due à un défaut de cicatrisation, lié au tabac, à l’obésité, à la dénutrition, au port de charges lourdes (ex : travail physique), au fait d’avoir été opéré en urgence, au fait d’avoir déjà eu d’autres hernies ou encore une infection de la cicatrice lors de la chirurgie initiale. Les efforts postopératoires sont eux aussi un facteur de risque d’éventration (port de charges, toux chronique, constipation…).

Quels sont les risques ?

Vous pouvez présenter des douleurs si un segment digestif passe par le trou et se coince.

Si ce segment digestif se coince durablement et ne peut plus rentrer à l’intérieur du ventre, il s’agit qu’une complication grave, qui nécessite une intervention en urgence qui risque de nécessiter une résection de l’intestin ou parfois une poche (stomie) temporaire à l’extrême. C’est l’éventration étranglée.

Il peut y avoir également une gêne esthétique, ou mécanique (difficulté respiratoire, constipation...)



 

A quoi sert la chirurgie ?

La chirurgie permet de corriger le défect (« trou ») dans la paroi abdominale et d’y réintégrer les viscères qui sortent par l’orifice. L’autre alternative est de ne pas réaliser d’intervention : l’éventration est laissée en place, malgré les risques d’étranglement, quand ce risque est faible et/ou que les pathologies du patient rendent la chirurgie trop risquée.  Les gaines ou ceintures peuvent aider à maintenir l’éventration, en revanche elles ne vont pas la traiter ni même arrêter sa progression.  Cela peut par contre apporter un confort.

Comment se déroule l’intervention ?

L’intervention se déroule sous anesthésie générale, ou dans certains cas sous anesthésie locorégionale, selon vos  problèmes de santé éventuels et le type d’intervention. Les modalités de l’anesthésie seront vues en consultation d’anesthésie.

L’intervention peut avoir lieu :

  1. Par voie ouverte : on ouvre l’abdomen, en général en reprenant les cicatrices déjà réalisées auparavant. Cet abord est appelé laparotomie.
  2. Par cœlioscopie (abord mini-invasif) : on insuffle un gaz dans le ventre pour créer un espace et réparer l’éventration avec des instruments insérés dans le ventre par le biais de trocarts (plusieurs petites incisions)
  3. En chirurgie ambulatoire ou conventionnelle, selon votre terrain et le type de réparation

Le choix de la technique dépend de votre type d’éventration, de détails techniques et de vos éventuels problèmes de santé (obésité, traitement particulier…).

Concernant le déroulé de l’intervention, le principe est de refouler et libérer les viscères et la graisse (épiploon) qui se situent dans l’éventration pour les réintégrer à leur place « normale ».  On dégage ainsi les bords de la zone de faiblesse, le « trou » (appelé collet).

C’est à cette étape qu’on réalise la réparation : soit par une simple suture (si contre-indication à une prothèse ou petit défect), soit en intégrant à la réparation une prothèse, jouant le rôle de rustine (appelée aussi « grillage », « filet », « plaque », « treillis »). Dans la plupart des cas ces prothèses sont en matériau synthétique, et constituent un corps étranger. Elles s’intègrent progressivement à vos propres tissus, constituant ainsi une réparation durable dans le temps et solide.

Dans certains cas, le chirurgien peut vous proposer un type de prothèse dite « biologique », c’est-à-dire constituées à base de matériaux d’origine animale. Elles offrent un renfort moins solide mais peuvent être utiles en cas d’infection. Ces prothèses s’intègrent plus lentement dans les tissus.

Les prothèses sont parfois fixées, si c’est le cas ce sera par des points, agrafes ou colle selon la technique choisie.

Selon le type de votre éventration et sa localisation, le chirurgien choisira la technique qui sera la plus adaptée ainsi que le type et la taille de la prothèse.

Pour mettre en place la prothèse, il est souvent nécessaire de réaliser un rapprochement de l’aponévrose (enveloppe solide des muscles), et parfois un décollement cutané (décollement de la peau et la graisse situées sous la peau par rapport à l’aponévrose).

Pendant la période postopératoire où la prothèse s’intègre aux tissus pour finir par la fixer définitivement, il est important d’éviter les efforts qui pourraient mettre en tension la paroi abdominale et fragiliser la réparation.

La durée de l’intervention est variable selon l’ampleur de la réparation à effectuer.

Suites postopératoires habituelles

Selon l’importance de la réparation et votre terrain, le chirurgien peut choisir de mettre en place des drains (tuyaux en plastique), temporaires, qui permettent d’évacuer du liquide qui pourrait s’accumuler pour former un hématome (« bleu ») ou un sérome ( « liquide clair qui s’accumule au sein de la réparation »). Ces drains sont retirés dans les jours qui suivent la chirurgie, selon leur débit.

Sauf avis contraire, une réalimentation précoce vous sera proposée dès votre retour dans votre chambre, ainsi qu’un lever précoce, qui permet de prévenir les complications liées à l’alitement (phlébites, nausées…). Sauf protocole particulier, il n’y a pas de régime particulier à suivre en postopératoire.

Dans les suites, il n’est pas rare de ressentir une tension sur la paroi abdominale, surtout s’il y avait une réparation importante à effectuer. Ces tensions peuvent être calmées par des antidouleurs.

A votre sortie de l’hôpital, il faut éviter tout effort physique qui sollicite la paroi abdominale (ports de charges, pousser le caddie, porter les enfants, travaux de ménage, bricolage, jardinage, faire des « abdos », efforts sexuels…) pendant 6 semaines. En fonction de votre activité professionnelle, un arrêt de travail pourra vous être proposé. Un rendez-vous de suivi sera organisé avec votre chirurgien, dans les mois qui suivent l’intervention. Eventuellement, un suivi à un an de la chirurgie avec un examen de radiologie pourra être organisé afin de ne pas méconnaitre une récidive.

Quels sont les risques de la chirurgie ?

1. Pendant la chirurgie

Selon la grosseur de l’éventration la libération des viscères est plus ou moins facile. Comme on intervient dans une zone déjà opérée, il peut y avoir des adhérence/accolements entre les organes que l’on va disséquer. Au cours de cette dissection, on peut accidentellement léser le tube digestif, dans environ 10% des cas. Ces plaies sont dans la plupart des cas vues pendant la chirurgie et suturées. Selon la contamination qui a eu lieu, cela peut contre-indiquer la mise en place d’une prothèse car il existe un risque plus marqué d’infection.

Si la chirurgie est trop difficile ou techniquement impossible en cœlioscopie, le chirurgien peut être amené à faire une « conversion « (ouvrir l’abdomen).

Enfin, dans de rares cas, on peut être amenés à réséquer (retirer) un ou plusieurs organes, afin de réaliser une réparation dans des bonnes conditions.

2. Immédiatement après l’intervention
  • Un hématome peut survenir, dans environ 20% des cas. Il nécessite rarement une reprise chirurgicale pour l’évacuer.  Il peut cependant faciliter une infection. Il est plus fréquent si vous prenez un traitement anticoagulant ou anti agrégant.
  • Un sérome peut également survenir : il s’agit d’une poche de liquide propre entre les différents plans séparés pour la chirurgie et la mise en place de la prothèse. Ils sont parfois évacués à l’aiguille ou au bloc opératoire.
  • Dans 10% des cas le transit tarde à se rétablir (il s’agit d’un iléus), l’intestin est comme paralysé par la chirurgie. Les signes peuvent être des nausées, vomissements ou ballonnements. Cet iléus peut parfois nécessiter la mise en place temporaire d’une sonde nasogastrique qui va aspirer le contenu des intestins et soulager les nausées et vomissements jusqu’à ce que le transit reparte.
  • L’infection postopératoire n’est pas très fréquente, et souvent superficielle (infection de la peau). Dans ce cas-là, les pansements seuls suffisent. Si c’est une infection plus profonde, le chirurgien peut demander un scanner ou une échographie pour en avoir la preuve et cela prolonge votre hospitalisation. Selon les cas les antibiotiques seuls peuvent ne pas suffire. Il faut donc retirer la prothèse lors d’une nouvelle intervention.
  • Comme toute chirurgie peuvent survenir : thrombose, phlébite, infection urinaire, respiratoire, allergie à des médicaments, décompensation de maladie sous-jacente (respiratoire, cardiaque…)
3. A plus long terme

Le principal risque est la récidive, que l’on estime à 12%, tous types de cure d’éventration confondus.  Parfois, notamment en cœlioscopie, il n’y a pas de récidive mais une prothèse qui bombe, ce qui fait une sorte de bosse qui ressemble à une éventration.

Enfin, quelques rares patients peuvent garder des séquelles à type de douleurs chroniques. Ces douleurs sont liées à une irritation des nerfs sensitifs de la paroi abdominale. Cela peut nécessiter une prise en charge spécifique par l’équipe de la douleur.